dimanche 1 août 2010

La déclaration de grossesse

Quand l'enfant arrive...

Depuis 1556, obligation était faite aux femmes enceintes non-mariées ou aux veuves de déclarer leur état de grossesse aux autorités, et ce, sous peine de mort. Les procès-verbaux d'audition de ces femmes attendant un enfant nous apprennent le nom de la femme, son âge, son origine géographique, son métier, sa filiation et parfois nous renseignent aussi sur l'identité du séducteur et les circonstances de leur relation (promesse de mariage...).

Ici, grâce à la signature, on peut remarquer que la jeune femme sait écrire son nom, chose assez rare dans les milieux populaires.

Cette source utile à connaître pour quiconque cherche à reconstituer l'histoire de sa famille peut être consultée en série B des Archives départementales mais aussi dans le fonds des justices de Paix.

"L'an neuvième de la République française le quatre floréal avant midy;
Devant nous jean Baptiste Degaffet juge de paix du canton de Prez arrondissement de Chaumont département de la Haute-Marne.
S'est présenté Chaterine Rabis fille majeure demeurant à Aillianville, âgée de vingt sept ansnée de Jean Baptiste Rabis et de défunte Chaterine Morel ses père et mère.
Laquelle nous a dit que pour éviter tout soupçon sur sa conduite et enfin satisfaire aux lois et usage, elle vient nous déclarer que depuis environ trois ans le nommé Joseph Taillandier, âgé de vingt ans fils de Nicolas Taillandier et (blanc) ses père et mère demeurant audit Aillianville et fréquemment venu la visiter sous les promesses de l'épouser ce que par site de cette connaissance, elle se trouve être grosse et enceinte des œuvres dudit Joseph Taillandier d'environ six mois, à laquelle séduction elle s'est laissée aller encouru à la sollicitation dudit Taillandier fils, toujours sous la promesse de se marier ensemble, lequel Joseph Taillandier est les seul homme qui la fréquenté de laquelle déclaration elle nous requiert acte pour lui servir et valoir ainsi qu'à l'enfant dont elle se trouve être grosse en temps et lieu ce qu'au cas il appartiendra.
Par quoi nous juge de paix susdit et soussigné avons donné acte …."

Joseph Taillandier ne régularise pas la situation, et n'épouse pas Catherine Raby.

Le poids social et religieux était tel que les filles-mères subissaient le déshonneur et étaient obligées bien souvent d'aller accoucher dans un village éloigné de leur habitation. Cette fois ci ce ne sera pas le cas. A peine un mois et demie après, le 18 prairial an IX Catherine Rabby accouche d'un petit garçon prénommé Claude en présence de deux témoins Jean Baptiste Raby le jeune, le frère de l'accouchée, cloutier de son état, âgé de 21 ans, et de Nicolas Huguet 48 ans, laboureur. La sage femme déclare alors en présence "les susdits témoins que la couche prématurée de ladite Catherine Raby fille, provient d'une chute qu'elle a fait et que l'enfant n'a au plus que six mois, ladite sage femme a également déclaré présence les susdits témoins, que ledit enfant avait différentes parties qui n'étaient pas formées entièrement"… Inéluctablement, le 23 prairial, Claude, âgé de cinq jours, décède.
Le 6 août 1806, Catherine Raby épouse Joseph Liégeois qui exerce la profession de bûcheron. Un moins beau parti que celui de Joseph Taillandier, rapidement qualifié de propriétaire, et qui convolera avec Marie Reine Cottenot dont il aura au moins trois enfants. Un temps maire d'Aillanville, il y décèdera le 29 juillet 1846. Catherine Raby lui survivra jusqu'à l'épidémie de choléra dont elle succombera le 25 juillet 1854.



Sources: Archives départementales de Haute-Marne L3348